Quand le passé vit encore dans le corps
On croit souvent qu’un traumatisme, c’est un souvenir douloureux du passé.
Mais le vrai traumatisme, celui qui dérange encore aujourd’hui, n’est pas qu’un souvenir : c’est un état.
Le corps ne vit pas dans le passé, ni dans le futur.
Il vit dans le présent.
Et quand quelque chose de trop violent, trop flou, ou trop intense a été vécu — souvent dans l’enfance —, il arrive que le corps reste figé dans ce moment, même si la tête ne s’en souvient pas.
Le psychiatre Bessel van der Kolk explique que le traumatisme n’est pas « l’événement », mais ce qu’il laisse dans le système nerveux :
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de la tension permanente,
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de la vigilance excessive,
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de la peur sans cause,
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ou une forme de déconnexion, d’engourdissement, de blocage.
On peut vivre normalement, travailler, aimer, discuter,
et en même temps avoir un corps qui reste coincé dans l’alerte, la fuite ou la dissociation.
Mais comment guérir, si je ne me souviens pas ?
On ne cherche pas à se rappeler.
On cherche à réapprendre au corps qu’il est en sécurité.
Cela passe par :
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Des liens stables, bienveillants (relation thérapeutique, amicale, intime)
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Des pratiques corporelles douces (respiration, mouvement, écoute du ressenti)
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Des espaces où l’on peut exprimer sans expliquer
Intégrer, ce n’est pas oublier
C’est laisser ce qui a été vécu re-devenir passé, au lieu de se rejouer chaque jour dans le présent à notre insu ou pas…
Guérir d’un trauma, ce n’est pas se libérer d’un événement.
C’est retrouver son rythme intérieur,
reprendre sa place dans son propre corps,
et pouvoir dire, doucement :
“C’était avant. Ce n’est plus maintenant.”